Le Cayrol, petite commune rurale de l’Aveyron, abrite dans une vallée l’Abbaye Notre-Dame de Bonneval où ma grand-tante Marie Bernard (1907-2000) vécut pendant 74 ans.
Situé entre Espalion et Laguiole, Le Cayrol est un village de moyenne montagne à environ 800m d’altitude dans le Parc Naturel régional de l’Aubrac.
L’Abbaye est fondée au début du XIIe siècle par les Cisterciens et devient l’une des plus importantes du Rouergue. A la Révolution, les moines sont chassés, l’abbaye vendue comme Bien national et une partie des bâtiments sert de carrières de pierres. En 1875 une petite colonie de moniales de l'ordre cistercien de la stricte observance (Trappiste) est autorisée à revenir. Elles vivent dans le silence, la prière et le travail manuel. L’Abbaye est reconstruite et la production de chocolat devient la principale activité.
Sœur Ange
Marie Bernard naît le 23 décembre 1907 à Saint-Sauveur-en-Rue dans la Loire, huitième des dix enfants de Louis Bernard (1863-1933), facteur, et de Marie Georges (1867-1933) institutrice de l’école des Congrégations. Elle a laissé un témoignage de son enfance et de ses débuts à Bonneval lors de son Jubilé en 1980, anniversaire des 50 ans de ses vœux.
Son enfance se déroule peu de temps après la Séparation de l’Eglise et de l’Etat et l’interdiction des Congrégations enseignantes. Marie décrit le refus de sa mère d'inscrire les enfants « à la laïque », les après-midis de cueillette d’herbes médicinales, les lettres de candidatures envoyées aux Trappistes.
Le 12 novembre 1926, à presque 19 ans, c’est le départ accompagnée de sa sœur aînée Andrée âgée de 30 ans, malgré les réticences de leur père. Le voyage de 270 km se fait en train en une journée, en passant par Le Puy puis un second changement à Bertholène. Arrivées à Espalion un taxi les conduit à Bonneval. Marie ne cache pas une dernière hésitation pendant le trajet.
Elle devient Sœur Ange et décrit dans la suite de son témoignage la vie au monastère: entretien de l'église, garder les cochons, travaux : préparation du ciment pour refaire la turbine après un glissement de terrain, travail à la chocolaterie (moulage, brûloir, amidonnier), foins, moissons, pommes de terre, châtaignes.
Mon grand-père rendait visite à sa sœur une fois par an et nous rapportait des chocolats. Au début il lui parlait à travers une grille mais la règle s’assouplit avec le temps et les dernières années ils pouvaient se trouver dans la même pièce.
Sources : Photographies et papiers personnels. L'abbaye cistercienne Notre-Dame de Bonneval et le ravin de la Boralde Flaujaguèse, Le Cayrol, Aveyron, France. Site web: http://www.abbaye-bonneval.com