La première épouse de mon ancêtre Pierre Antoine Christ est décédée à trente-quatre ans. Ses affaires personnelles ont été vendues aux enchères et un inventaire après décès a été effectué, consignés dans deux actes notariés qui permettent de l’imaginer dans son quotidien.
Née le 24 juillet 1786 dans la paroisse de Buhl dans le Bas-Rhin, Marguerithe Kégé est la fille d’un tailleur. Elle épouse le 25 octobre 1809 à Siegen Pierre Antoine Christ, cultivateur et tisserand. Les jeunes mariés sont âgés de vingt-deux et vingt-trois ans. Si l’acte est rédigé en français, les époux parlent alsacien et signent avec des caractères allemands gothiques.
Six enfants sont issus de cette union, le second ne vit qu’un mois. Marguerite meurt le 29 novembre 1820 trois mois après la naissance du benjamin. Pierre Antoine, père de cinq enfants de moins de dix ans, doit se remarier rapidement et pour cela régler la succession de sa femme.
La première étape est la vente aux enchères publiques des vêtements de Marguerithe dans la maison de la défunte.
Les pièces d'habillement sont classiques mais leur nombre important pour l’époque, soulignant l’aisance du couple. Certes le père de la défunte était tailleur mais il faut être en mesure de se procurer le tissu.
Marguerithe possédait six jupes, certaines estimées entre 4,90 et 9,60 francs, des prix élevés signant leur bonne qualité. La jupe de mariée noire est adjugée à Pierre Antoine.
Sont ensuite proposés à la vente sept corsets, le moins cher est conservé par la fille aînée bientôt âgée de dix ans. Elle aura également l’un des trois « juste au corps » et deux mouchoirs de poches mais aucun de sept tabliers. Quatre bonnets partent chez des voisins, un autre est acheté par Michel Christ, frère de Pierre Antoine, et le dernier par Catherine Bethary qui deviendra la seconde épouse.
La vente se poursuit: cinq mouchoirs de cou, dix chemises, une autre jupe. Pierre Antoine achète le collier avec un crucifix d’argent.
L’ensemble rapporte 142 francs.
Le notaire procède ensuite à un inventaire après décès. Marguerithe possédait des terres dans son village d’origine et était copropriétaire avec ses frères et sœurs de la maison de ses parents. Tous ces immeubles ont été vendus depuis son mariage pour un total de 2900 francs. Les terres de Pierre Antoine sont moindres.
Leur intérieur est modeste, les meubles en bois de sapin ou de cerisier et les ustensiles listés sont sans surprise en ce début du XIXe siècle. Deux objets plus précieux sont mentionnés: une pendule et un moulin à nettoyer le blé.
Le couple possède un cheval, un poulain, deux vaches, un veau et treize poulets. Le notaire liste les quantités de froment, orge, seigle, avoine ; les sommes prêtées et celles dues, aux voisins et à la famille.
L’avenir des enfants est clarifié grâce à ces deux démarches et Pierre Antoine peut épouser l’année suivante mon ancêtre Catherine Béthary avec laquelle il aura également six enfants, soit un total de douze.
Sources : Archives départementales du Bas-Rhin. Paysanne des environs de Strasbourg, Kochersberg. Première moitié du XVIIIe siècle- Ganier-Tanconville, Henri- 1882 (BnF Gallica).