Au milieu du XIXe siècle, la population de La Nouvelle Orléans s’accroit fortement. Alors qu’elle ne comptait que 25 000 habitants en 1810, elle fait plus que doubler vers 1830 et atteint 100 000 habitants en 1840. L’immigration française reste importante mais les Allemands et Irlandais arrivent également nombreux.
C’est dans ce contexte que le Lorrain Antoine Laubert tente sa chance en Amérique.
Une jeunesse dans les Vosges
Antoine Laubert vient au monde le 4 juin 1807 à Abreschviller, petit bourg du Massif des Vosges à une quinzaine de kilomètres de Sarrebourg en Moselle. Sa famille part vivre un peu plus au nord à Vilsberg. Il n’a que huit ans lorsque son père Antoine Laubert, garde-forestier, meurt. Sa mère Françoise Godron se remarie avec un manouvrier, François Choppé.
Devenu garde-forestier comme son père, Antoine part travailler à Lutzelhouse dans le Bas-Rhin, où il épouse le 18 janvier 1838 Marie Catherine Aubry, née le 6 janvier 1815 et fille d’un teinturier cultivateur. Les époux sont âgés de trente et vingt-trois ans.
Départ vers la Louisiane
Le code forestier de 1827 a restreint les droits d’usage dans les bois et les terres cultivables sont rares. La misère s’est installée dans le Nord-Est de la France. Les départs vers le Nouveau Monde commencent vers 1827-1828 et s’accélèrent : d’environ 900 les premières années, ils atteignent 10 583 en 1846.
Antoine Laubert quitte la France cette année-là. Il a eu trois enfants avec Marie, dont une petite fille, Marie Clémentine, qui est morte à l’âge de deux ans. Il a été cultivateur puis terrassier. À l’automne 1846, il s’embarque au Havre sur le Suffolk. Son épouse, enceinte de cinq mois, reste en France avec leurs deux fils: Antoine Gilbert, huit ans, et Jean-Baptiste, deux ans. La petite famille s’installe à Dijon.
Après deux mois de voyage, Antoine débarque à La Nouvelle Orléans le 16 novembre 1846, seul Français au milieu de nombreux Allemands. Mais il est probable qu’il parlait le Francisque rhénan et n’avait aucune difficulté à communiquer avec eux.
Recherches auprès du consulat
En mars 1858, la mairie de Dijon écrit au consul de La Nouvelle Orléans. Il lui demande de localiser Antoine dont la femme est décédée « il y a environ six mois ». Catherine est morte le 14 juin 1857, à seulement quarante-deux ans.
La lettre nous donne un certain nombre d’informations. Il semblerait que le couple, pourtant illettré, avait réussi à correspondre. Antoine est devenu menuisier et son fils aîné, Antoine Gilbert, dix-neuf ans, ferblantier.
La famille restée en France connait aussi les noms des connaissances d’Antoine, un doreur miroitier et un marchand de chaussures, ainsi qu’un parent Aubry, son beau-frère ou un cousin de sa femme. Antoine est retrouvé et le consul envoie son adresse à la mairie de Dijon en mai 1858.
Mais Antoine ne rentre pas en France. Il décède le 25 novembre 1858 à La Nouvelle Orléans à l’âge de cinquante-deux ans.
Son acte de décès n’a pas été trouvé mais il est mentionné dans les actes de mariage de ses fils.
- Antoine Gilbert (1838-1929), ferblantier puis employé au Paris-Lyon-Méditerranée (P.L.M.) épouse en 1866 Anne Hyrodie (1841-après 1929).
- Jean-Baptiste (1844-1908) reste célibataire.
- Lucien Charles Lobert (1847-1883), ajusteur mécanicien, n’a jamais connu son père et son patronyme a été modifié. Il épouse une de mes lointaines cousines Marie Colombier-Lavague (1848-après 1886).
Sources : Archives départementales de la Moselle, du Bas-Rhin et de la Côte-d'Or; Archives diplomatiques; Adrien Persac, Port and City of New Orleans 1858, Historic New Orleans Collection ; Voiturage des grumes, vers Saint-Dié, en 1896. Phototype ancien du Centre Image Lorraine. Caillet Pierre; Camille Maire, L'émigration des Lorrains en Amérique (1815-1870). In: Revue d’histoire moderne et contemporaine, tome 30 N°4, Octobre-décembre 1983. pp. 646-649
