Quatre mariages et … deux enterrements, précédés de deux divorces.
Pauline Luxemburger, cousine germaine de mon grand-père, est née le 13 juin 1886 à l’hôpital de la Charité à Lyon 2ème, fille de Pierrette Luxemburger et d’un père inconnu. Son acte de naissance avec ses mentions marginales résume sa vie. Elle est reconnue par sa mère deux semaines plus tard, se marie quatre fois et décède en 1953 à l’âge de soixante-sept ans.
Sa mère Pierrette Luxemburger (1866-1915), âgée de vingt ans, travaille comme journalière et vit avec sa sœur cadette Thérèse, dix-huit ans, au 75 rue de la Pyramide à Vaise, Lyon 5ème (actuellement rue Marietton à Lyon 9ème).
Leur mère est morte quatre ans plus tôt. Leur père Louis et leurs frères Paul, Michel et Joseph Luxemburger résident tous à Vaise, quartier ouvrier très animé en plein développement en cette fin de siècle, mais dans des garnis voisins. La fratrie est unie, l’union libre et les naissances hors mariage sont habituels dans la famille comme dans le milieu ouvrier des grandes métropoles de cette époque.
Pauline grandit avec sa mère et sa tante Thérèse et pendant quelques années avec l'époux de cette dernière, Jules Groffe employé du Paris-Lyon-Méditerranée (P.L.M.). Le couple part à Genay dans l’Ain (voir G comme Garde-barrière). La mère et sa fille restent seules rue de la Pyramide.
Premier mariage
Le 20 janvier 1912 à la mairie du 5ème arrondissement Pauline Luxemburger, vingt-cinq ans, épouse Louis Levert, vingt-sept ans, confiseur. Les futurs se connaissent probablement depuis l’enfance. Louis est né le 22 janvier 1884 au 64 rue de la Pyramide et réside rue de Bourgogne. Il est le dernier d’une fratrie de sept.
L’année précédente, il est enfin rentré d’un service militaire de quatre ans pendant lequel périodes d'armée et de prison se sont enchaînées. Affecté au 10ème Cuirrassiers, il a déserté plusieurs fois.
Lorsque la Première Guerre mondiale éclate, Louis est mobilisé dans les services auxiliaires pour « rhumatisme ». Il est donc présent lorsque Pauline accouche le 30 décembre 1914 à l’Hôtel-Dieu, Lyon 2ème, d’un petit Marcel Louis qui meurt de convulsions trois semaines plus tard le 20 janvier 1915 à l’hôpital de la Charité. Ce sera le seul enfant de la jeune femme.
Les malheurs continuent en cette année 1915. Pierrette, la mère de Pauline, décède le 8 mars à l'âge de quarante-neuf ans. En septembre, Louis est rappelé sous les drapeaux mais ne se présente pas. Arrêté par la gendarmerie de Lyon, jugé « déserteur à l’intérieur en temps de guerre », il est condamné à cinq ans de travaux publics en Algérie.
Il rentre en 1920. Pauline demande le divorce et l'obtient sans peine le 16 mars 1921.
Deuxième mariage
Cette deuxième union ne dure que quatre ans (1924-1928), le couple se sépare après deux ans de vie commune et divorce.
Le choix de Pauline peut paraitre surprenant. Son nouvel époux Jean-Claude Fournat, trente-sept ans comme elle, est contremaître plieur sur étoffes. Divorcé et père d’une fille dont il a la garde mais qu’il a mis en pension, il a un profil un peu similaire à celui de Louis le premier mari. Condamné à plusieurs reprises pendant l’adolescence, il a été mobilisé dans un bataillon disciplinaire au Maroc avant d’être réhabilité et transféré dans un régiment de tirailleurs indigènes.
Jean-Claude demande le divorce et produit une lettre dans laquelle Pauline reconnait avoir « fait un grosse sottise » et avoir « attiré des ennuis par des scènes de jalousie ». Le divorce est prononcé aux torts de Pauline. Mais elle fait appel et produit un constat huissier d’adultère. Les torts sont inversés. L’amende qui lui avait été infligée est remboursée.
Troisième mariage
Pauline convole une troisième fois le 14 février 1929 à Villeurbanne avec Louis Alphonse Victor Ribeyre, apprêteur teinturier. C’est un voisin veuf avec un fils de vingt-huit ans déjà marié. Les nouveaux époux sont âgés de cinquante-deux et quarante-deux ans.
Probablement échaudée par ses premières unions, Pauline établit un contrat de mariage qui fournit un aperçu de ses biens. Malgré ses déboires précédents, elle est en mesure d’apporter son « trousseau composé de linges, vêtements, fourrures et bijoux à son usage personnel », ses meubles « une chambre à coucher de style Louis XV en noyer » avec un lit garni, une armoire à glace, une table de nuit et une table de chambre, ainsi qu’un salon de même style, une salle à manger de style Henri II et du mobilier de cuisine. Elle possède un service de vaisselle en porcelaine, une batterie de cuisine, des linges de maison, quelques tableaux et bibelots, une machine à coudre et un phonographe Pathé.
Cette union dure environ neuf ans. Louis décède le 2 octobre 1937, à l’âge de soixante-et-un ans, à l’hôpital Edouard-Herriot.
Quatrième mariage
Pauline, représentante en mercerie, est donc veuve à cinquante-et-un ans. Ses précédents époux, tous deux remariés de leur côté, sont également morts en 1931 et 1933.
Pauline signe le 7 décembre 1940 à Villeurbanne son quatrième acte de mariage. Joseph Marius Vernier, quarante-quatre ans, est mécanicien, veuf à deux reprises et père d’une fille de vingt ans.
Elle choisit par contrat le régime de la séparation de biens et garde « l’entière administration de ses biens meubles et immeubles et la jouissance libre de ses revenus ». Le mobilier décrit onze ans plus tôt est toujours là, s'y ajoute les économies accumulées depuis. Une partie de la somme provient de la vente de la maison qu'elle possédait avec son troisième mari.
Le couple vit onze ans ensemble. Joseph décède à domicile le 15 février 1952 à l’âge de cinquante-cinq ans.
Sans enfant, des cousins germains peut-être perdus de vue, Pauline rédige un testament désignant sa belle-sœur légataire universelle. Elle meurt l'année suivante le 22 juin 1953 à l’Hôpital Edouard-Herriot, à l’âge de soixante-sept ans.
Sources : Archives municipales de Lyon (2E814) ; Archives départementales du Rhône (6 M 354, Uciv1153, Uciv1248, 3 E 46803); cartes postales: Geneanet